Dans le troisième spectacle du Cirque Inextremiste, Rémi Lecocq arrive à bord d’un tractopelle. Devenu tétraplégique à l’âge de 21 ans, le jeune homme a troqué son habituel partenaire de jeu, le fauteuil roulant, pour cet engin de chantier grâce auquel il envoie valser dans les airs ses deux partenaires. À part ça, l’attirail de la troupe est des plus élémentaires : un sol de sable, une poubelle, des bonbonnes de gaz sur lesquelles reposent de longues, étroites et lourdes planches de bois. Tout le propos de cette représentation à haut risque tient en quelques certitudes : il n’y a pas de handicap qui empêche un acrobate passionné de s’adonner à son sport favori, pas d’apesanteur qu’on ne puisse défier, pas de voltiges qui résistent à la souplesse et à la volonté. Rémi, aux manettes de son infernale machine, envoie ses camarades planer bien au-delà du sol. Leurs corps oscillent d’un bout à l’autre des planches avalées dans les mâchoires de la pelle. Il est seul maître à bord de ce qui se passe en altitude. Tout là-haut, les acrobates ont fort à faire pour éviter la chute. Nous ne verrons pas souvent un spectacle à ce point énergique, drôle, exaltant et porteur d’optimisme.